La prochaine conférence annuelle Moodle aura lieu du 4 au 6 juillet 2018 à Bruxelles. J’y animerai une présentation sur le standard xAPI et réserve pour cette occasion une petite annonce… Voici en attendant quelques réflexions qui devraient largement nourrir ma présentation.
Pourquoi Moodle ?
Que l’on aime ou pas cette plateforme, il faut bien reconnaitre qu’elle constitue le plus grand succès Open Source du monde des LMS. Il existe bien sûr des alternatives qui ne manquent pas d’intérêt, au premier rang desquelles on trouve ILIAS, Chamilo ou encore Open EDX et Canvas si l’on élargit la recherche à l’univers des MOOCs. Mais Moodle semble être la seule plateforme à avoir atteint une réelle taille critique. Sa communauté est puissante, en particulier dans le monde universitaire. Son développement est constant, assuré par une équipe professionnelle, des 10aines de partenaires et des 100aines de volontaires. Et son financement est assuré, non seulement par les revenus issus des services, mais aussi par des financements extérieurs. Moodle a en effet annoncé une levée de fond de 6 millions d’euros fin 2017, auprès d’un investisseur français ! De quoi voir l’avenir sereinement…
Pourquoi xAPI ?
xAPI permet potentiellement de tracer toutes les activités supportées par un LMS. Pas seulement la consultation des contenus, comme le faisait SCORM, mais bien l’ensemble des activités : interactions sociales, remise de travaux personnels, évaluation sous toutes ses formes, etc.
D’accord, mais Moodle, bien que ne supportant pas xAPI, assure déjà cette traçabilité. Certes, il le fait avec ses propres techniques, ses propres formats et sa propre base de données, mais il le fait déjà. Alors pourquoi faudrait-il s’encombrer d’un standard comme xAPI ? Les raisons sont nombreuses mais je vais en retenir 3 :
- Analyses à grande échelle – Il semble que dans la foulée des universités britanniques, plusieurs universités françaises se lancent aujourd’hui dans la mise en œuvre de Learning Analytics à grande échelle, au sein d’un établissement ou d’un réseau d’établissements (à lire sur le sujet). Dès lors, les données à analyser proviennent souvent de plusieurs plateformes. Il est alors nécessaire de collecter et regrouper les traces issues de ces systèmes en adoptant un format commun. xAPI a justement été conçu pour ça.
- Eco-systèmes pédagogiques – C’est la 2ème tendance lourde. Le LMS, qui joue un rôle central dans la formation, ne suffit plus à servir toute la diversité des contextes pédagogiques. De nombreux systèmes viennent s’y adjoindre, qu’il s’agisse de solutions de collaboration, d’évaluation, d’animation le présentiel, ou encore de solutions destinées aux formations pratiques. xAPI permet de regrouper les traces issues de ces différents systèmes, et ainsi de bâtir une image globale du parcours de l’apprenant.
- Analyse fine des contenus – Dernier tendance significative : dépasser les frustrations de SCORM en proposant un suivi plus fin et plus pertinent. Certains contenus s’y prêtent bien, notamment les plus scénarisés. Mais on trouve aussi le format vidéo, très en vogue, qui apporte de bonnes surprises malgré sa simplicité. xAPI permet par exemple d’identifier le comportement des apprenants à partir de leurs interactions (visualisation passive, pauses, replay, etc.). A lire sur le sujet…
Ces 3 exemples impactent directement le LMS. Les 2 premiers parce que l’on veut pouvoir extraire les traces que le LMS a lui-même généré. Le dernier parce que le LMS doit permettre de déployer et de jouer des contenus qui génèreront leurs propres traces. xAPI présente donc un fort intérêt, pour Moodle comme pour les autres plateformes LMS.
Comment faire du xAPI avec Moodle ?
Premier point important, Moodle n’est pas nativement conforme à xAPI, et même si le sujet est régulièrement évoqué, il ne semble pas que cela soit à l’ordre du jour. Il faut donc chercher la solution de côté des extensions. En la matière, 2 plugins ont acquis une certaine notoriété.
Le 1er est TinCan Launch (ou xAPI Launch Link), qui permet d’importer un contenu xAPI dans Moodle puis de le lancer afin qu’il puisse communiquer directement avec un LRS. Ce plugin a le mérite de fonctionner avec les contenus issus de plusieurs outils auteurs connus (Captivate, Storyline, etc.). En revanche, la méthode utilisée (TinCan) est ancienne et devrait être remplacée par CMI5, qui est le protocole officiel pour ce sujet, plus sécurisé et plus clair quant au format des traces. Mais à ce jour, il n’existe à ma connaissance aucun plugin CMI5 disponible.
Le 2nd plugin, nommé Logstore xAPI, permet d’écouter les événements internes de Moodle, de les transformer en traces xAPI, puis de les envoyer à un LRS. L’approche est très astucieuse quand on sait qu’il existe des événements pour à peu près tout dans Moodle. Bien sûr, tous les événements ne sont pas traités à ce jour. Mais la principale réserve que je ferais est que les traces générées gagneraient à respecter un certain nombre de bonnes pratiques. Un plugin intéressant donc, mais à utiliser en connaissance de cause.
Autre solution notable à signaler : il s’agit de la solution H5P qui est un outil auteur Open Source intégrable à Moodle. Un travail formidable a été fait pour assurer la génération de traces xAPI à partir des différents types de contenus produits. Toutefois, les traces ainsi générées ne sont pas acheminées jusqu’au LRS. Il est nécessaire de produire du code pour assurer l’intégration au LRS.
On le voit, les principales solutions que je viens d’évoquer montrent un certain intérêt pour xAPI dans la communauté Moodle, ce qui est une bonne chose. On reste toutefois un peu frustré car aucune solution ne parait réellement prête à l’emploi.
Conclusion
L’intérêt pour xAPI est grandissant dans la communauté Moodle. Pourtant, les solutions actuellement disponibles manquent encore de maturité.
L’explication se trouve dans la nature même du standard qui ne définit pas l’ensemble des concepts nécessaires à sa mise en œuvre. xAPI définit le format général des traces – leur grammaire – mais ne définit pas le vocabulaire et les bonnes pratiques associées. xAPI ne définit pas non plus précisément les modalités d’intégration entre un LMS et un LRS.
Face à ces manques, une réflexion, des expérimentations et un partage d’expérience au sein de la communauté Moodle peuvent avoir une grande valeur. Et c’est un sujet sur lequel j’apporterai ma contribution. La suite le 6 juillet à Bruxelles. Venez nombreux !
D’autres articles vous attendent sur notre tout nouveau site dédié aux données d’apprentissage.